Du 7 au 9 décembre 2016 s’est tenu le troisième conseil fédéral de la Fédération des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ). Y ont participé, comme il est d’usage, les membres des conseils exécutifs des syndicats affiliés à la FNEEQ. Ces réunions, qui se tiennent régulièrement deux fois par année ou plus, selon les circonstances, sont l’occasion de discuter d’enjeux importants et de voter les recommandations définissant les orientations politiques de notre fédération.
La présidente de la FNEEQ, Caroline Senneville, a rappelé dans son discours d’introduction la position humaniste que notre organisation a adoptée envers l’éducation. La FNEEQ s’est positionnée en effet contre la marchandisation de l’enseignement supérieur et la vision utilitariste de l’éducation qui en découle. Les élèves et les étudiants y sont considérés d’abord comme de futurs citoyens avant d’être vus comme de futurs travailleurs. Cela dit, il n’est pas question ici de dévaloriser l’importance du travail et de l’emploi, mais plutôt de valoriser l’importance d’acquérir une formation générale qui permette d’acquérir une vision éclairée du monde actuel. Les dernières élections américaines sont à cet égard un exemple du triomphe de la démagogie et du populisme. Comment une grande partie de la population a-t-elle pu adhérer à ces discours haineux, xénophobes, et misogynes? Selon la présidente, il faut ramener la raison, les idées et les faits au centre de la vision politique. Sur un autre plan, Ann Gingras, présidente du Conseil central de Québec Chaudière-Appalaches (CCQCA), a déclaré être enchantée de la présence accrue des enseignants au conseil central, ce qui donne lieu à une meilleure diversité des points de vue dans les équipes de travail et dans les instances.
Cette réunion ordinaire du Conseil fédéral a permis d’aborder le sujet de deux consultations ministérielles récentes : la première à propos de la réussite éducative du ministre Sébastien Proulx et la seconde qui concerne l’enseignement supérieur, de la ministre Hélène David. Les propositions de madame David ont été rejetées dans l’ensemble par la Table des partenaires universitaires (TPU) qui regroupe 200 000 membres de la communauté universitaire. Ces derniers désapprouvent notamment l’objectif de compétitivité internationale préconisé par la ministre, l’absence de membres actifs issus du milieu syndical au sein du futur Conseil des universités et la surreprésentation d’observateurs étrangers externes. La FNEEQ a choisi plutôt de s’appuyer sur la plateforme en éducation de la CSN, L’Éducation : un droit humain, une responsabilité sociale! Parmi ses revendications se trouvent, entre autres, un contrôle accru de la prolifération des campus satellites et un encadrement plus strict de la rémunération des hauts dirigeants des universités.
Un autre dossier a retenu l’attention des membres lors de ce conseil fédéral. Ce dossier concerne les relations à caractère sexuel entre un étudiant ou une étudiante et son enseignant ou enseignante. Les discussions ont débuté par un constat, celui du lien de confiance à la base de toute relation pédagogique, une relation caractérisée aussi par la position d’autorité qu’occupe l’enseignant par rapport à l’étudiant. Ce rapport d’autorité exige la prévention de tout conflit d’intérêt, notamment en ce qui concerne l’évaluation des travaux étudiants qui doit être fondée sur l’équité et l’impartialité, et que peut compromettre une relation intime. Quatre propositions ont donc été débattues par l’assemblée avant d’être adoptées :
- la proposition no 1 réaffirme les positions de la FNEEQ contre la violence, la discrimination et le harcèlement sexuels et affirme que « pour des raisons éthiques (…) il est inapproprié d’entretenir un rapport intime (amoureux ou sexuel) avec une étudiante ou un étudiant dans une relation pédagogique ou d’autorité ». Notre fédération appelle donc ses syndicats affiliés « à proscrire tout rapport intime (amoureux ou sexuel) avec une étudiante ou un étudiant dans une relation pédagogique ou d’autorité »;
- la proposition no 2 recommande « que la FNEEQ et ses syndicats locaux s’assurent que le processus de plainte contre le harcèlement et la discrimination sexuels soit sécuritaire, crédible, accessible, impartial et efficace, et qu’ils le fassent connaître »;
- la proposition no 3 recommande « que la FNEEQ produise pour les exécutifs des syndicats un guide pratique dans le traitement de ces dossiers » étant donné leur complexité et les difficultés de traitement rencontrées dans les syndicats locaux, et la nécessité de bien s’outiller pour faire face à ces situations;
- la proposition no 4 recommande « [q]ue le comité école et société, en collaboration avec le comité femmes et le comité orientations et identités sexuelles, complète sa réflexion à ce sujet afin d’éclairer toutes les dimensions de la question » et d’informer les membres de l’adoption de ces recommandations.
Par ailleurs, sans la lignée des préoccupations de la CSN et d’autres centrales syndicales, plusieurs sujets d’ordre social ont été exposés ou débattus : des communications ont été présentées par un panel d’invités à propos de la campagne sur le salaire minimum (5-10-15) tandis que le comité femmes de la FNEEQ a souligné l’initiative réalisée le 25 novembre lors de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, puis les douze jours d’actions réalisées au Québec et au Canada qui ont culminé le 6 décembre — jour anniversaire de la tragédie de Polytechnique —, lors de la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes. Une recommandation proposée par le comité environnement de la FNEEQ, qui a abouti à une Politique de dons en environnement, concerne des mesures visant à diminuer les émissions de CO2 occasionnées par les nombreux déplacements des membres lors de la tenue des instances. Parmi ces mesures figurent l’incitation au covoiturage ainsi que la majoration des remboursements de dépenses associées à l’usage du transport collectif qui sont versés aux syndicats. De chaque versement versé par la CSN, la partie majorée est acheminée dans un fonds qui servira à la réalisation de projet structurant en développement durable. Cette nouvelle politique entrera en vigueur à partir du mois de janvier 2017. Une proposition du comité d’action internationale visait quant à elle à répondre à la demande de quatre syndicats haïtiens de l’éducation concernant l’établissement d’un centre d’apprentissage et de ressources ainsi que d’une bibliothèque en Haïti. La recommandation adoptée consiste à verser une somme de 4 000 $ cette année, jusqu’à concurrence de 10 000 $ sur 3 ans, en vue de la réalisation de ce projet structurant. Enfin, la FNEEQ et ses syndicats ont appuyé par des dons individuels les travailleurs de deux syndicats en grève (Hôtel Pur et Hôtel Classique) (photo ci-dessus).
Lire le texte intégral des recommandations adoptées.
Vincent Mauger
Vice-président aux relations intersyndicales
et Anne Beauchemin
Vice-présidente aux communications