La Télé-Université Laval poursuit l’étendue de son offre de formation à distance. Cette fois, là où on s’y attendait le moins : dans la relation de mentorat auprès des stagiaires en enseignement. Les futurs enseignants et enseignantes du primaire et du secondaire ne pourront ainsi plus compter sur la présence de superviseurs en milieu de stage pour les accompagner dans leurs apprentissages.
Selon le Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage, l’avenir de la formation pratique en enseignement repose dorénavant sur la vidéoscopie, c’est-à-dire une prestation filmée, auto-évaluée par l’étudiante ou l’étudiant à l’aide d’outils théoriques et supervisée à distance, en différé. Exit le contact direct avec les classes où enseignent les stagiaires. Des « pratiques innovantes » – entendre numériques – supposant ainsi que les pratiques pédagogiques misant sur les rencontres en présentiel seraient devenues désuètes, archaïques ou dépassées.
Ce choix étonne, au moment où l’Université Laval, dans le cadre de ses engagements stratégiques, dit vouloir miser sur le fait que les étudiantes et les étudiants pourront vivre une expérience hors du commun dans leur parcours de formation. Seuls, face à la caméra à s’auto-analyser, on peut se questionner sur la plus-value de l’expérience vécue par les stagiaires.
C’est aussi l’incohérence entre les décisions politiques du gouvernement du Québec et l’orientation prise par l’Université Laval qui surprend. En effet, au moment même où la ministre de l’Enseignement supérieur annonce, via la nouvelle politique de financement des universités, que les montants versés par étudiant inscrit en sciences de l’éducation seront augmentés, la Faculté des sciences de l’éducation coupe sur le budget d’encadrement et réduit de moitié le temps accordé aux étudiantes et étudiants stagiaires. De 324 heures par 12 étudiants en 2017-2018, le budget consacré ne sera que de 150 heures en 2018-2019.
Sur la gestion du dossier en général, on déplore que le Vice-rectorat aux ressources humaines ait cherché à contourner le Syndicat dans la mise en place de ces transformations majeures, qui touchent la grande majorité des superviseurs de stages en éducation. En négociation de notre convention collective, nous avions pourtant convenu d’aborder prochainement le sujet de la Lettre d’entente no 9, qui concerne spécifiquement les superviseurs de stages.
Nous sommes également extrêmement préoccupés par l’opacité et le manque de transparence dans ce dossier, alors que ces décisions ont été prises il y a déjà plusieurs mois, selon le département. Ces façons de faire contreviennent à notre vision de saines relations de travail et sont susceptibles d’alimenter la méfiance et la résistance. Ce n’est pas ce que nous voulons pour l’avenir.
Notre colère tient finalement au fait qu’en raison de cette réorganisation du travail, plusieurs personnes ont perdu leur emploi. En modifiant la pédagogie, on jette les superviseurs, rien de moins! Ces derniers l’ont appris à la dure, sans aucune considération envers leurs nombreuses années de services et la qualité de leur engagement. On ne souhaite à personne une telle fin de carrière à l’Université Laval.
Christine Gauthier
Présidente