« Les enseignants précaires de l’université disent leur ras-le-bol ». Ainsi titrait le journal Le Monde le 6 avril dernier pour expliquer la lutte que mène actuellement les docteurs et doctorants qui travaillent sous contrat dans les universités de France. Ils dénoncent leurs conditions financières difficiles et l’aggravation de la précarité en éducation. Même bardés de diplôme, ils ne parviennent pas à trouver une place satisfaisante sur le marché du travail ni à gagner convenablement leur vie.
Au Québec, à quelques jours de l’ouverture des 2ème États généraux en enseignement supérieur (ÉGÈS) qui se tiendront à l’UQAM, le cheap labor en enseignement universitaire sera encore dénoncé. Dans l’ensemble des universités québécoises, ce sont entre 40% et 50% des cours qui sont donnés par des contractuels depuis 40 ans. À un point tel que l’on peut affirmer que si les universités peuvent soutenir leur mission d’enseignement et de recherche, c’est parce qu’elles ont développé un modèle systémique et endémique d’organisation du travail construit autour du précariat.
Les ÉGÈS offriront d’ailleurs l’occasion de questionner les représentants politiques sur notre avenir et notre place au sein des universités. Madame la ministre Hélène David, comment faire pour enrayer la précarité croissante en enseignement supérieur au Québec? Quelles solutions pouvons-nous trouver pour favoriser le déploiement des carrières et des ambitions professionnelles des enseignants universitaires contractuels? Et non, il ne s’agit pas ici de « l’autonomie des universités », mais bien d’un choix politique, celui de revoir un système qui reconnaît fort mal notre travail et notre contribution à l’éducation. Celui également de miser sur la qualité de l’enseignement supérieur : « Précarité de la main-d’œuvre : une menace pour la qualité de l’enseignement supérieur ».
L’Université Laval ne fait pas exception à cette tendance. Après les compressions, on s’inquiète maintenant de l’ultra-précarisation. On observe par exemple une augmentation des contrats courts et, pour les chargés d’enseignement, des régimes d’emploi diminués. Globalement, si la masse salariale est restée à peu près la même depuis un an (+1.6%), le nombre de chargés de cours qui ont obtenu des contrats a quant à lui augmenté de 114 personnes par rapport à l’an dernier (+9%).
Je souligne tout de même la volonté de l’Université Laval, dans le cadre de sa planification stratégique, de travailler à soutenir et à mieux encadrer les carrières de son personnel. Mais derrière cette volonté, on ne connaît pas encore les solutions qui seront mises de l’avant pour consolider et enrichir les parcours professionnels. Quels sont les espoirs pour les chargées et chargés de cours?
En terminant, l’orage gronde actuellement dans les rangs syndicaux. Les tactiques managériales odieuses de la TÉLUQ pour se débarrasser de ses tuteurs et tutrices, en sous-traitant leur travail à une entreprise privée à but lucratif, nous a permis de constater la force et la solidarité du Regroupement Université FNEEQ-CSN, composé de près de 10 000 chargées et chargés de cours. Loin de parvenir à casser les tuteurs et tutrices, la TÉLUQ est en train de dynamiser notre mouvement et de renforcer notre détermination à faire connaître le ras-le-bol généralisé que vivent plusieurs de nos membres, ainsi qu’à nous mobiliser tant qu’il le faudra pour obtenir une plus grande reconnaissance de notre travail.
Christine Gauthier
Présidente