Tout le monde se souviendra de ce triste incident à l’Université Laval, celui où des étudiantes ont été victimes d’agressions sexuelles commises en pleine nuit, alors qu’un individu s’était introduit dans les résidences universitaires. Une onde de choc a secoué toute la population du Québec et nous a poussé à regarder la réalité en pleine face : les violences sexuelles sont malheureusement répandues et trop souvent banalisées.
Depuis ce jour d’octobre 2016, beaucoup de chemins ont été parcourus. Impulsé par des groupes militants féministes, étudiants et syndicaux, la classe politique québécoise (sous le leadership d’Hélène David, alors ministre au dossier) et les institutions d’enseignement supérieur ont pris au sérieux le fléau des violences sexuelles.
Nouvelle politique et nouveau centre d’intervention
Le 16 septembre prochain, trois ans plus tard, l’Université Laval lancera sa formation en ligne dorénavant obligatoire pour l’ensemble des travailleurs et travailleuses, des étudiantes et étudiants du campus en vertu de la Loi visant à prévenir et combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur (RLRQ, c. P-22.1). Pour lire la politique adoptée par l’Université Laval, cliquer ICI.
Parmi les faits saillants à retenir pour les chargées et chargés de cours :
- Un nouveau Centre d’intervention et de prévention des violences à caractère sexuel (CIPVACS) a été créé pour répondre à toutes demandes concernant les violences sexuelles (local 3310 du pavillon Alphonse-Desjardins, près des locaux du Syndicat).
- « La coexistence de liens intimes, tels qu’amoureux ou sexuels, et l’exercice d’une fonction pédagogique ou d’autorité par un membre du personnel de l’Université auprès d’une personne étudiante, est interdite ». À défaut de pouvoir mettre fin à la relation, le ou la chargée de cours doit se désengager de la relation pédagogique qui existe avec l’étudiant ou l’étudiante :
- La politique s’applique à tous les membres de l’Université, « y compris lors d’une activité universitaire ou lors d’une activité personnelle, avec ou sans l’utilisation des médias sociaux ou numériques, lorsque les relations entre les personnes sont déterminées par le fait qu’elles sont membres de l’Université ».
Avoir une politique claire, sans ambiguïté, c’est très bien et nous tenons à souligner le sérieux accordé par l’Université Laval à ce dossier. Mais pour enrayer durablement la situation, il faudra s’assurer de la participation des « témoins actifs ». Ici, tous les représentants syndicaux, membres de la direction, employés de l’Université Laval, étudiants sont interpellés. Au-delà des engagements politiques et des structures, ce sont aussi nos conduites qui auront des impacts significatifs. Que ce soit pour écouter et accompagner les personnes qui se disent victimes de violences, les diriger vers les bonnes ressources, ou encore pour dénoncer des pratiques abusives ou témoignant de violences, nous avons tous l’obligation d’agir lorsque nous sommes témoins de situations préoccupantes.
Et pour les violences psychologiques, où en sommes-nous?
Impossible de passer sous silence la sémantique des mots choisis. En préférant le mot « violence », beaucoup plus englobant, à ceux de « harcèlement » et « d’agressions », plutôt limitatifs à la répétition des gestes ou au fait de poser un acte, c’est un changement de paradigme qui s’est imposé dans cette lutte contre les violences sexuelles.
Nous revendiquons aussi ce changement de paradigme dans la lutte aux violences psychologiques en milieu de travail. Un premier geste en ce sens pourrait être de renommer le Centre de prévention et d’intervention en matière de harcèlement psychologique (CPIMH), en remplaçant le terme « harcèlement » par celui de « violence psychologique ». Et de porter une plus grande attention aux violences structurelles qui découlent des rapports d’emploi inégaux.
Il est urgent de prôner la « tolérance zéro » envers toutes formes de violence psychologique, que ce soit entre collègues ou dans les relations avec les étudiants et étudiantes dans nos classes. Car ce n’est pas normal de recevoir des insultes, d’être ignorés dans les corridors, ou simplement de ne pas être salués par les collègues et supérieurs dans notre milieu de travail.
Plusieurs cas récents de comportements agressifs et de violence verbale ou écrite de la part d’étudiants vis-à-vis des enseignants et enseignantes nous ont par ailleurs été rapportés. Quoi faire lorsque cela survient? Quel rôle joue la direction d’unité? Comment l’employeur doit-il agir dans de telles circonstances de façon à préserver un environnement psychologique sain pour les chargées et chargés de cours?
L’Université Laval nous assure travailler actuellement à consolider une plus grande culture du respect et veut s’attaquer aux comportements incivils. Nous allons continuer à nous préoccuper de ces questions afin que soit pris au sérieux toutes demandes d’intervention en lien avec la violence psychologique au travail.
Bonne rentrée à tous et à toutes,
Christine Gauthier
Présidente