Les chargées et chargés de cours ont encore fait les manchettes lors de la rentrée universitaire. Malheureusement, pas pour les bonnes raisons.
D’abord, une étude est venue réaffirmer que le recours aux enseignants contractuels est en croissance dans les établissements d’enseignement supérieur au Canada et que les très mauvaises conditions de travail dont ils bénéficient ont des impacts négatifs importants sur leur santé. Ces « précaires permanents » (j’insiste sur le paradoxe) se sentent à bout de souffle, mal reconnus, surchargés, toujours face à un avenir incertain.
Bref, rien de vraiment nouveau. On le sait depuis longtemps que la précarité, c’est comme la cigarette, ce n’est pas bon pour la santé. La vraie question est : pourquoi en est-il encore ainsi? Pourquoi ne sommes-nous pas en train de resserrer les règles et de rendre plus difficile le recours aux salariés contractuels?
Comme l’a soulevé un des directeurs de l’ACPPU, il n’est pas normal qu’un travailleur en lien d’emploi depuis 20 ans chez un même employeur soit toujours sous contrat et non un employé permanent. Ou encore que des travailleuses et des travailleurs très qualifiés, qui ont délaissés leur carrière comme professionnelles en santé, en langues, en éducation, en sciences infirmières, en pharmacie, en droit ou en administration pour enseigner à temps plein à l’université, puissent être soumis à la menace constante de perdre leur emploi ou de voir réduire leur régime d’emploi.
Ensuite, le 4 septembre dernier, un professeur de l’UQAR, spécialiste du financement des universités au Québec, a démontré que l’image des chargés de cours est toujours entachée de préjugés. Il a avancé à Radio-Canada que la formation offerte par les chargées et chargés de cours serait de moins bonne qualité puisque ces enseignants ne seraient pas en contact avec la recherche scientifique, allant même jusqu’à dire que les étudiantes et étudiants recevaient des cours de niveau « Cégep Plus ».
Nous sommes profondément en désaccord avec M. Martin Maltais et nous avons le devoir de combattre ces préjugés tenaces.
À l’Université Laval, 45% des chargées et chargés de cours ont des doctorats ou sont en voie de le compléter, selon une étude que nous avons menée en 2015 et à laquelle 641 de nos membres ont répondu. Plusieurs d’entre eux publient des articles scientifiques, donnent des conférences, etc. À cela s’ajoute plusieurs personnes qui, grâce au Fonds de perfectionnement, s’assurent de demeurer à la fine pointe des avancées scientifiques et pratiques dans leurs champs de connaissances. Et s’il est vrai que plusieurs chargées et chargés contribuent au développement de la formation pratique sur le campus, tels qu’en pharmacie, en médecine dentaire ou en musique, on doit convenir qu’il s’agit d’un enseignement résolument de niveau universitaire par les connaissances à la fois théoriques et pratiques qui y sont exposées.
S’attaquer à de tels préjugés et travailler à réduire la précarité supposent de brasser certains éléments de la structure et de changer drastiquement de direction. Il faut concevoir autrement la place des chargées et chargés de cours au sein de nos universités et s’interroger sur le fait que la flexibilité financière des universités repose trop souvent sur le dos des chargées et chargés de cours, ce qui est un problème structurel.
Christine Gauthier
Présidente