La liberté académique, un droit ou un privilège, par qui, pour qui ?

Le 33e Congrès de la FNEEQ se tenait du 1er au 4 juin 2021. Un grand nombre de sujets touchant l’enseignement supérieur étaient à l’ordre du jour. L’application de la Loi 101 dans les cégeps, la formation à distance (en contexte de pandémie, mais aussi postpandémie), les partenariats et la place de l’entreprise privée en éducation, les conclusions du Chantier sur l’université du futur et, bien sûr, la liberté académique.

Si vous avez participé aux Midi-causeries organisés par le SCCCUL ou si vous lisez nos publications, vous savez que nous avons souhaité être proactifs sur cet enjeu. Pour ce faire, le 24 février dernier, plusieurs d’entre vous ont participé à un échange sur une des conclusions du Chantier du l’université du futur qui soulignait que « la liberté académique ne jouit pas au Québec d’une protection législative à large portée » (p. 66). Dans un contexte où la frénésie l’a emporté sur la rigueur, où l’analyse journalistique a laissé toute la place à la course au nombre de clics sur Internet, il n’est guère étonnant qu’il se soit formé diverses opinions sur la question. Au-delà des bruits de fond, il s’est dégagé de nos échanges que plusieurs étaient inquiets, se sentaient seuls ou mal informés. En conséquence, le Comité des relations de travail du SCCCUL a rédigé un billet, publié dans l’Info-SCCCUL, destiné à informer et rassurer les personnes chargées de cours de l’Université Laval.

En parallèle, la FNEEQ invitait les syndicats de chargées et chargés de cours à rédiger des mémoires sur cet important enjeu. Le tout visait à faire en sorte que les syndicats engagent le dialogue avec leurs membres, à voir ce qui s’en dégagerait, et à contribuer à enrichir la réflexion générale de la Fédération. Le tout tombait à point car nous recevions, au début juin, un appel à mémoires de la Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique dans le milieu universitaire. Le SCCCUL a aussi rédigé un mémoire, puisant largement dans nos échanges avec vous, dans la jurisprudence, dans les balises, les politiques et règles existantes, pour l’envoyer rapidement à la FNEEQ. Nous pourrons maintenant le partager avec la Commission scientifique. Cela dit, avant de ce faire, nous pourrons le bonifier, notamment en puisant cette fois dans les discussions tenues lors du récent congrès de la FNEEQ.

La première chose à mentionner est la différence de perception, ou de réalité, dans la définition, voire l’application de la liberté académique chez les personnes chargées de cours dans les universités et chez nos collègues des cégeps. Pour certains, la question se résume à de la sémantique : on parle alors des « libertés universitaires » et la question est close. Mais si on parle de liberté « académique », de liberté d’enseignement, de liberté pédagogique, le tout confronté au « devoir de loyauté », force est de constater que la question va plus loin et que la réflexion doit suivre le même chemin. À quoi bon un « droit » conventionné quand, comme on l’a vu dans les cas les plus médiatisés, les administrations universitaires n’appliquent pas les règles existantes et ne se portent pas à la défense de leurs personnels ? La loyauté se jouerait à sens unique ? Et si c’est un privilège, alors qui l’accorde et à quel groupe ? Faut-il une loi-cadre ou une législation nationale quelconque pour contraindre les universités ? Qu’en est-il alors de l’autonomie des universités ? Peut-on faire confiance à l’État pour baliser une liberté comme la liberté académique ? De plus, est-ce qu’un enseignant contractuel peut « véritablement » exercer sa liberté académique ?

La solution n’est pas simple et nous participerons aux consultations en diffusant les positions adoptées par le SCCCUL. Il faut aussi déboulonner certaines idées préconçues, réitérer que les croyances ne sont pas des faits et que la liberté académique s’incarne dans la critique rigoureuse des idées. Enfin, nous serons aux aguets des conclusions de la Commission scientifique à l’automne.

Sylvain Marois
Vice-président aux relations intersyndicales

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