Le syndicalisme est apparu à Québec au 19e siècle ?

Le syndicat le plus puissant au Canada, au 19e siècle, se trouvait à Québec, plus précisément au port de Québec? Fondée le 23 juillet 1862, la Société de bienfaisance des journaliers de navire (Quebec Shiplabourers Benevolent Society) regroupait plusieurs centaines de membres. Comme les associations de travailleurs ont été interdites par la loi jusqu’en 1872, les journaliers de navire de Québec se sont regroupés en tant que « société de bienfaisance » et ont pu, ce faisant, contourner la loi. Comme charger d’énormes pièces de bois sur les navires était un travail très dangereux, un syndicat était devenu nécessaire afin de protéger les travailleurs. Les instigateurs de ce mouvement provenaient d’Irlande, un pays sous le joug de l’Angleterre, où les gens avaient appris que c’est seulement en s’organisant à plusieurs qu’ils avaient une chance de se mesurer à l’autorité coloniale.

Après une première tentative à l’été 1855, où les militants ont essayé sans succès d’imposer un arrêt de travail par la violence et l’intimidation, au début des années 1860, c’est par la voie d’une pétition qu’ils réussirent à créer la société. Le député de Québec Ouest, Charles Alleyn, fut le porteur du dossier à la législature. Après une grève en 1866 où les marchands ont finalement acquiescé aux demandes de la Société – notamment que les hommes soient payés à bord du navire après le chargement – l’organisation se développe et devient un syndicat en bonne et due forme avec des règles strictes. La cotisation de 25 sous par saison procurait alors au membre en règle une assurance-salaire de 13 semaines en cas de blessure au travail et une pension de 20$ pour la veuve, en cas de décès.

Bien que la première section de la Société ait été fondée par les Irlandais du quartier Champlain, environ 40 % des noms sur la pétition de 1862 étaient canadiens français. Au plus fort de son existence au 19e siècle, la Société de bienfaisance des journaliers de navire comptait cinq sections réparties sur les deux côtés du fleuve.

Robert Grace
Vice-président à la vie syndicale et à la mobilisation

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