Nos étudiants ne sont pas des sardines! Stop à la démesure des groupes et de la charge de travail

Sous des prétextes économiques et un désir de rentabilité, on emprunte leur stratégie aux entreprises qui font toujours plus avec moins (font-elles vraiment mieux?), et on nous réduit à une situation de plus grande précarité encore : on amalgame plusieurs groupes d’étudiants en un seul, on entasse les générations de demain comme des sardines, on prive nos collègues de charges de cours et on nous confie l’immense responsabilité d’enseigner, avec rigueur, connaissances et équité (naturellement!) à chacune des personnes inscrites à notre cours. Et si nous refusons, on trouve sitôt quelqu’un de plus précaire encore pour nous remplacer.

Nous devons dénoncer cette dynamique insidieuse et malsaine! Mais c’est seulement ensemble, en revendiquant haut et fort, que nous arriverons à la faire cesser. Autrement, ce qui nous parait invraisemblable aujourd’hui nous semblera normal dans quelques années. Nos conditions de travail seront toujours plus dépréciées, et nous ne parviendrons plus à interagir avec nos étudiantes et étudiants, devenus trop nombreux et anonymes.

En effet, depuis quelques années, le nombre d’étudiants dans plusieurs cours a doublé, triplé, quadruplé, voire davantage. Certains collègues, pour un cours de rédaction par exemple, ne comptent plus 20 ou 30 étudiantes et étudiants, mais bien 80 par classe ! Bien souvent, ce sont des cours pratiques dans lesquels le mandat est d’accompagner les étudiants individuellement, dans une approche pédagogique différenciée qui forme à la vie réelle. Ambition qui n’est plus envisageable dans les conditions actuelles.

Ce phénomène, en croissance exponentielle, se répercute sur tout : du nombre de copies à corriger qui augmente, au suivi interminable de courriels, en passant par l’adaptation des évaluations qui ne peuvent plus porter sur le contenu, la nuance ni la réflexion individuelle, mais sur des projets en très grands groupes et des apprentissages « par cœur » avec examens encodés pour gagner du temps.

Dans ces conditions, l’enseignement perd sa profondeur, sa richesse et finalement sa raison d’être.

Pendant ce temps, nos supérieurs soutiennent, à la manière de notre gouvernement provincial, que la qualité de l’enseignement n’est pas touchée. Pourtant, dans ces classes trop petites pour accueillir cette masse estudiantine venant de tous les horizons et désireuse d’apprendre, se multiplient les cas d’êtres humains en difficulté (parce que si on en comptait déjà dans des groupes moins nombreux, on en compte forcément plus maintenant). Or, le temps pour repérer ces personnes plus fragiles, diagnostiquer leurs problèmes et prendre le temps de les résoudre avec elles, ce temps, lui, ne se multiplie pas; ni l’énergie pour le faire.

Ce ne sont pas les cours à distance qui vont changer la donne, eux dont le contingentement s’arrête à 999 (heureusement que le « système » ne comporte que trois chiffres !). On nous dit que, de nos jours, les nouvelles technologies ont presque remplacé l’enseignant. Il n’en demeure pas moins que l’utilisation de ces mêmes technologies pour le joindre à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, de semaine comme de fin de semaine, illustre combien la personne enseignante est encore, pour nos étudiantes et étudiants, un phare, une référence précieuse et indispensable. Mais cette « référence » s’épuise, pressée comme un citron dont on veut extraire les dernières gouttes avant d’en jeter l’écorce.

Le comité des relations du travail,

Élisabeth Cyr,
Louis Émond
Suzanne La Vallée
Louis Lefrançois

← retour vers Info SCCCUL